lundi 18 février 2013

Faciliter la prise de décision de l’entrepreneur, les clés de l’ABM (Activity Based Management).



L’entrepreneur d’aujourd’hui anticipe l’évolution de son marché, prend des décisions dans ce sens et en suit les résultats afin d’engager les actions correctives nécessaires….en quelque sorte il « pilote » son entreprise.



C’est sur la base de ce constat que nous avons décidé d’interviewer un expert, sous le prisme de l’Activity Based Management (ou ABM) si prometteur à ses débuts mais assez peu mis en œuvre depuis, du moins en France. Cet expert est Jean Louis Leignel, fondateur de M.A.G.E. Conseil et ex vice-président de l’AFAI (Association Française de l'Audit et du Conseil Informatiques) en charge de la Gouvernance des Systèmes d’Information. Au-delà de son expérience des systèmes d’information il a surtout été en charge du contrôle de gestion dans de grands groupes internationaux comme Saint Gobain, Schneider Electric ou LVMH.



Bickley Park : ABM, à l’instar d’ABC et d’ABB, apparait pour beaucoup de dirigeants comme une démarche très théorique. Pouvez nous en quelques mots nous expliquer ce que signifient ces acronymes et comment ils s’articulent entre eux, dans quel objectif ?

Jean Louis Leignel : Qu’on pense « pilotage de la performance » ou pilotage d’un bateau, on commence par se fixer une « cible », puis on définit la trajectoire optimale et les moyens nécessaires pour l’atteindre. Ça n’est qu’ensuite qu’on va devoir se préoccuper de « faire le point » régulièrement pour connaître sa situation réelle et prendre toutes les mesures nécessaires (plans d’action) pour corriger d’éventuelles dérives.
De la même façon, si on veut utiliser l’ABM comme outil de pilotage de la performance, il convient de commencer par l’ABB (Activity Based Budgeting), qui permet d’élaborer un budget prévisionnel construit à partir de prévisions de ventes ou de production et intégrant un ensemble d'objectifs de performance qui sont nécessaires à l’atteinte de la marge « cible ».
La suite logique de l'ABB, c'est l'ABC (Activity Based Costing) prévisionnel. A partir du même « modèle », on calcule les coûts des activités, des produits et services à tous les niveaux. On arrive ainsi à des notions de coûts standards, de coûts prévisionnels, de coûts et de marges prévisionnels. 
L’étape suivante est l'ABM (Activity Based Management). On analyse les écarts de performance entre le réel et les objectifs ABB, pour en déduire des plans d'actions. On a besoin pour cela d'une collecte d'informations réelles de toutes natures, qui seront intégrées dans le modèle : quantités vendues, chiffre d’affaires, quantités fabriquées de produits semi-finis/composants/matières, heures de production, dépenses par centre de responsabilité, etc...
En utilisant toujours le même modèle et les mêmes informations, on peut enfin faire de l’ABC réel pour calculer les coûts unitaires réels des produits et services. Ces coûts sont évidemment intéressants à connaître …mais ce ne sont que des « résultats » ! En termes de pilotage, il est plus important de connaître ce qui s’est passé au niveau des « leviers d’action » ayant conduit à ces résultats.
En procédant ainsi, on évite de tomber dans une démarche purement comptable de calcul de coûts, comme c’est trop souvent le cas quand on se focalise sur l’ABC seul. En mettant en place une démarche ABB/ABC/ABM, on construit un outil de management très concret et très opérationnel, ce qui n’est pas pareil !


Bickley Park : dans quel type d’entreprise une démarche ABM  est intéressante à mettre en œuvre ?

Jean Louis Leignel : Cette approche est intéressante pour tout type d’entreprise fabriquant des produits très variés à partir de ressources polyvalentes. Plus la variété de produits et services sera grande, plus les ressources utilisées pour les produire seront mutualisées, et plus l’application d’une démarche ABB/ABC/ABM sera intéressante et utile. C’est le cas par exemple des hôpitaux et des DSI (surtout lorsqu’elles prennent la forme de GIE).
S'il n'y a pas quelque part un conflit pour l'allocation des ressources à travers du matriciel et de la transversalité, ces approches, qui représentent des méthodes de gestion sophistiquées, ne se justifient pas vraiment.


Bickley Park : ABM apparait souvent comme la démarche des contrôleurs de gestion, mise en œuvre par eux avec un sponsor fort qu’est le directeur général.  Quelle gouvernance  est réellement efficace pour réussir ABM dans la durée ?

Jean Louis Leignel : Si on considère l’ABM au sens complet ABB/ABC/ABM, on voit bien qu’il s’agit là d’un outil de « pilotage de la performance » d’une entreprise, avec des conséquences fortes en termes d’évaluation du management (à tous niveaux) par rapport aux objectifs négociés dans le cadre de la démarche budgétaire. C’est donc un système de management, qui peut avoir de fortes incidences en ce qui concerne la gestion des ressources humaines et les rémunérations.
Une telle méthode de management ne peut donc être mise en place que sous l’impulsion de la Direction Générale et avec la participation des principaux responsables opérationnels de l’entreprise …. le sponsoring du seul Directeur Financier n’est pas suffisant, alors qu’il pourrait l’être pour une démarche limitée à un calcul de coûts ABC !
Une fois implantée, l’animation de cette démarche doit être confiée au Contrôle de Gestion, qui pourra ainsi remplir son rôle fondamental, qui est bien l'aide à la prise de décision au niveau des directions générales ou des directions opérationnelles.


Bickley Park : mettre en œuvre ABM demande de refondre son système d’informations. Ces dix dernières années on a vu les éditeurs d’ERP et de solutions décisionnelles proposer des modules dédiés à cette démarche. Faut-il vraiment une telle refonte du système d’informations comme prérequis à ABM ?

Jean Louis Leignel : L’ABM ne doit pas nécessiter une refonte du système d’informations….si tel était le cas, cela voudrait probablement dire que le modèle a été mal construit, ce qui peut arriver lorsqu’il n’a pas été pris dans le sens ABB comme préconisé ici. En effet, le système d’informations opérationnel, qui est destiné à faire tourner l’entreprise au quotidien, peut certes nécessiter une refonte…mais ça sera alors dans le cas de besoins opérationnels (prise de commandes, planification de la production, approvisionnements, facturation, etc…) uniquement. Les ERPs, au sens propre, peuvent dans certains cas apporter des solutions pertinentes pour aider les entreprises à améliorer ces processus opérationnels.
Mais, le « décisionnel » (même s’il est vendu par des éditeurs d’ERP…) c’est autre chose !  Il s’agit d’un système de « pilotage » comprenant les fonctionnalités décrites ci-dessus. Ce système comporte principalement des données prévisionnelles et des objectifs, qui, par nature, ne proviennent pas d’un système opérationnel (ERP ou non….).  Il doit bien sûr être alimenté en données réelles provenant des systèmes opérationnels, mais cela ne suppose en aucun cas qu’il entraîne une refonte de ces systèmes…tout au plus peut-il induire quelques aménagements au cas où certains « leviers » révélés par la mise en place du modèle ABM ne figureraient pas dans ces systèmes « amont » !
En ce qui concerne les systèmes « décisionnels » proposés par les éditeurs d’ERP, il est à noter qu’ils ont été conçus dans une optique ABC de répartition de charges connues par ailleurs pour calculer des coûts et non pas dans une optique ABB de détermination des ressources et des charges nécessaires à la réalisation des objectifs de l’entreprise. Compte tenu de ce « pêché originel », on observe qu’ils ont beaucoup de mal à changer d’optique pour devenir des outils d’aide à la décision…ce qui serait quand même le minimum pour du « décisionnel » !


Bickley Park : pour beaucoup, ABM est plutôt l’affaire des grandes entreprises qui peuvent allouer des moyens conséquents à sa mise en œuvre. Comment implanter cette démarche dans une PME ?

Jean Louis Leignel : C’est la complexité des processus de production des produits/services qu’il faut considérer et non pas la taille des entreprises. On peut en effet trouver de petites entreprises avec des processus complexes, et, à l’inverse, de grandes entreprises avec des processus simples de consommation des ressources par les produits/services.
Pour une petite entreprise, qui aurait des processus de production complexes, il est évidemment important d’y voir clair dans la consommation de ses ressources …probablement plus encore que pour une grosse entreprise qui peut s’offrir le luxe (pendant quelque temps du moins …) de subventionner certains produits par d’autres.
Dans ce cas, il est normal qu’elle consacre quelque effort à la mise en place de cette démarche…en restant bien sûr dans les limites du raisonnable par rapport à la taille de l’entreprise et aux enjeux. Et ce, d’autant plus que l’effort financier n’est pas forcément très important si on évite les « usines à gaz » chères et souvent inutiles en construisant le modèle dans une optique ABB d’élaboration budgétaire articulée autour d’indicateurs de performance clés, sur lesquels le management aura à se fixer des objectifs d’amélioration ….en procédant ainsi on se concentre obligatoirement sur l’essentiel !


Bickley Park : si vous devez convaincre un entrepreneur, dirigeant de PME française, de l’intérêt d’ABM, quels sont les cinq mots clé que vous utilisez ?

Jean Louis Leignel :
  1. Pilotage de la performance
  2. Management basé sur l’atteinte d’objectif
  3. Responsabilisation
  4. Maîtrise des coûts par une meilleure allocation des ressources de l’entreprise
  5.  Amélioration de la marge opérationnelle par d’éventuelles actions de rééquilibrage du portefeuille « produits x clients »
Merci Jean Louis Leignel,

Thierry Biyoghé











lundi 4 février 2013

On parle du lancement de Bickley Park

Le communiqué officiel du lancement de Bickley Park est désormais disponible sur Internet.

Communiqué de Presse du lancement de Bickley Park

Blog de Bickley Park: les prochaines interviews

Bickley Park va interviewer dans les prochaines semaines, des experts sur des thèmes propres à l'entreprise en mouvement.


  • La création d'entreprise dès les études supérieures: de nos jours les étudiants se lancent dans les start-ups, fers de lance de notre économie. Qu'est ce qui les motivent, pourquoi si tôt, avec quelles aides et dans quelle perspective à moyen terme. Pour répondre à ces questions, j'ai préféré interviewer une jeune créatrice d'entreprise de services, innovante et originale.
  • Le Knowledge Management: l'entreprise progresse quand elle diffuse bien son savoir faire en interne voire à l'extérieur. Le Knowledge Management, popularisé par les cabinets de conseil via l'acronyme KM, demande non seulement des outils performants et faciles d'usage mais aussi un engagement du management pour valoriser ceux qui capitalisent et encourager les autres à partager.
  • Le Change Management: il existe bien des idées reçues sur ce thème et j'ai souhaité interviewer une spécialiste qui le voit autrement. Sa vision est pragmatique, réaliste, basée sur des programmes de transformation qui prennent vraiment en compte l'humain
  • L'Activity Based Costing ou ABC: cette approche économique a connu un fort engouement des consultants et des grandes entreprises dès sa sortie à la fin des années 80. Puis le soufflé est retombé car de la théorie à la pratique il y avait un long chemin de croix. Nous allons aborder ABC par un prisme différent, plus adapté aux entreprises de taille intermédiaire (ETI), celles qui ne peuvent se payer des batteries de consultant pour mettre en oeuvre une telle approche.
  • La Balanced Scorecard ou BSC: à l'instar d'ABC, la BSC a connu un effet de mode au début des années 2000. Véritable outil de management de la performance, j'ai trouvé intéressant d'interviewer un éditeur qui l'aborde sous un angle différent.
  • Le métier de trésorier: on en parle beaucoup en ces temps de crise et il recouvre des réalités bien différentes. L'expert que je vais interviewer en a une vision originale et très vraie; il rappelle des principes de base (il en a même écrit un livre) qui font ce métier.

Si vous avez des thèmes à faire partager, faites le moi savoir.

L'interview est le moyen le plus simple de faire passer des messages clairs.

A bientôt,

Thierry Biyoghé