En fin 2011 j’ai publié un
point de vue sur la transformation de la
fonction finance ; j’abordais alors ce thème par le prisme de ce qui
était attendu de cette fonction par
rapport à son positionnement, son
rôle dans l’entreprise.
Le présent article ne vise
pas à synthétiser ce point de vue ; il focalise sur des points plus
importants aujourd’hui qu’à l’époque et bénéficie des résultats d’études menées
par de grands cabinets de conseil sur le sujet.
La fonction finance a connu
ces dernières années une profonde mutation,
du fait d’un contexte règlementaire plus fort, d’une situation économique exceptionnelle et
d’attentes accrues de ses clients
internes que sont les décideurs
opérationnels.
Cette fonction finance peut être résumée en
trois rôles, nullement antinomiques :
- Le fournisseur qui produit des documents et des données à destination des autorités règlementaires dans une vue qualifiée de déclarative (l’image classique de la comptabilité). A ces données et documents s’ajoutent des indicateurs et tableaux de bord dans une vue plutôt analytique. Son horizon est plutôt celui du court terme.
- Le conseiller qui se détache de la comptabilité et prend en compte de manière plus forte le métier (offre, demande, concurrence, moyens, innovation, environnement …) de l’entreprise et ajoute une dimension prospective aux activités et livrables de la fonction finance. Son horizon est le moyen terme.
- Le partenaire qui lui s’étend à la dimension stratégique du management (de l’élaboration à la mise en œuvre du plan stratégique) et permet de se projeter dans l’horizon à long terme que représente le futur de l’entreprise.
Pour une entreprise donnée, le
rôle de la fonction finance peut être celui de fournisseur, de conseiller et de
partenaire, avec des mineures et une majeure. Selon son degré de maturité sur la question ou de par la
position personnelle du directeur administratif et financier (DAF) dans le
collège managérial, une entreprise peut vivre la fonction finance sur un rôle
majeur et viser, par un programme de transformation, à la faire changer de
rôle. C’est d’ailleurs tout le débat qui agite les cabinets de conseil en
management autour du leitmotiv où le DAF doit être absolument positionné comme
‘business partner’ dans l’entreprise.
Nous ne débattrons donc pas ici de la pertinence de ce
dernier positionnement mais plutôt de comment changer la fonction finance de rôle,
dans le respect des attentes qu’en a le management général de l’entreprise.
Il s’agit essentiellement
pour les acteurs de cette fonction de prendre conscience des enjeux d’une telle
transformation, d’en comprendre l’objectif, de l’accepter, de s’impliquer et de
la pérenniser par un engagement fort.
Cette démarche suit cinq
phases successives ; au diagnostic
de l’existant (1) va succéder une analyse
d’impacts (2) puis la définition
de la transformation (3), son organisation
(4) et enfin son déploiement sur les
populations concernées. Toutes ces phases sont conjointement conduites sous les
axes procéduraux (comment), managériaux (pourquoi) et humains (qui).
- La phase de diagnostic :
Cette première phase
consiste à établir un état des lieux
de la fonction finance afin d’identifier
les axes d’amélioration et de
documenter l’écart à la cible. Elle est constituée d’analyse des documents
internes existant, d’entretiens individuels et collectifs ; son livrable est un
rapport de diagnostic.
- La phase d’analyse d’impacts :
Cette deuxième phase vise à qualifier l’impact qu’ont les projets de
transformation en cours sur la fonction finance-gestion et d’évaluer les adaptations à réaliser pour la mettre à niveau. Cette analyse
d’impacts se déroule par des entretiens individuels (le management) et
collectifs (l’équipe). Son livrable le plus représentatif est la matrice
d’impact permettant de visualiser rapidement la nature et la profondeur
de l’impact. Il s’agit d’une représentation graphique dans laquelle sont qualifiés
et placés les différents changements identifiés. L’objectif étant de déterminer
les populations les plus impactées, et donc nécessitant une attention particulière.
- La phase de définition de la transformation :
C’est au cours de cette
phase que sont définis la cible et
les attendus de cette transformation,
les vecteurs qu’elle va mobiliser tout en appréciant l’impact
qu’elle aura sur les collaborateurs concernés. La méthode utilisée s’appuie sur
quelques concepts (acteur, produit, client, ressource) définissant le mode opératoire dans un processus
collaboratif classique. Dans un mode de travail collaboratif comme celui que
vise la transformation de la fonction finance, il est indispensable de partager le même référentiel de collaboration. La méthode utilisée, basée sur des
entretiens individuels et surtout collectifs (puisqu’il s’agit d’appropriation
et de partage de références communes), permet ce partage. Elle s’appuie sur l’animation de groupes de travail dont le
but est de conserver la capacité d’échange et d’effet miroir.
Cette phase est complétée
par une nouvelle version de l’analyse d’impacts afin de définir ultérieurement
la trajectoire de la transformation.
- La phase d’organisation de la transformation :
Cette phase vise à définir la
stratégie de transformation. Elle
prend en compte les contraintes et
les opportunités, précise les compétences et moyens à mobiliser, valide les vecteurs les plus efficaces. Elle
permet de construire une trajectoire
réaliste et progressive. Elle se base sur l’analyse d’impacts finalisée lors de
la phase précédente.
Cette phase se traduit par
un plan d’accompagnement, lui-même composé de trois livrables distincts. 1/ le
plan de formation qui vise à
professionnaliser les équipes et en favoriser l’apprentissage, nécessite de
définir comment et avec quels vecteurs instaurer ce langage et ces références
communes. 2/ le plan d’assistance
qui, une fois la transformation lancée, consiste à ne pas laisser les équipes
sans appui dans le but d’éviter de revenir à des pratiques antérieures quand le
changement est trop long à intégrer. 3/ la planification
du programme de transformation, en particulier des actions de communication
permet enfin de donner de la visibilité à tous les niveaux de management.
- La phase de déploiement de la transformation :
Ce qui est important dans
cette phase, c’est essentiellement de ne pas oublier qu’un programme de
transformation doit être suivi et mesuré, en continu. Un plan d’accompagnement
est toujours sujet à des ajustements.
Ce ne sont pas tant les raisons d’ajuster le plan d’accompagnement qui
importent, il s’agit plutôt de se doter des procédures de suivi qui permettent
de qualifier ces ajustements et de les traduire en plan d’actions. Ce suivi
contribue à conserver le cap de la
transformation.
Thierry Biyoghé